Aide alimentaire européenne : après l’accord du Conseil européen, il faut poursuivre la mobilisation
L’accord du Conseil de juillet 2020 sur le budget européen et le plan de relance a été présenté, singulièrement par le Gouvernement français, comme un compromis historique et un pas de géant pour l’Europe. Qu’en est-il pour la question qui préoccupe les Restos et de nombreuses associations de solidarité, celle de la place de la lutte contre la pauvreté au sein des politiques européennes ? Le tableau est loin d’être idyllique, alors que la crise sociale qui se profile risque de faire basculer des millions de personnes dans la précarité.
Crédit photo : Pascal ITO
Rappelons d’abord qu’il existe un fonds spécifique, le Fonds européen d’aide aux plus démunis (FEAD), largement impulsé par Coluche lorsque Jacques Delors était président de la Commission européenne, qui permet d’assurer une aide matérielle et alimentaire à environ 15 millions de personnes en Europe. En France, il représente autour d’un repas sur trois distribués par les associations de solidarité. Initialement lié aux surplus agricoles de la PAC, il constitue désormais une politique sociale à part entière et le principal outil de lutte contre la grande pauvreté en Europe.
Sur ce sujet, l’accord des 27 apporte une avancée majeure : celle de la création d’un nouveau programme (le programme REACT) financé par le plan de relance européen, qui permettra jusqu’au 2022 d’abonder les politiques européennes de solidarité, en particulier le Fonds européen d’aide aux plus démunis (FEAD). C’était indispensable.
Mais les avancées obtenues n’ont pas permis de revoir à la hausse l’ambition du budget européen en lui-même, en particulier s’agissant des moyens alloués à la politique sociale : l’ensemble des programmes qui y contribuent – dont le FEAD- ont été intégrés au sein du « Fonds social européen + » dont les moyens sont insuffisants alors que l’Europe s’apprête à connaître une vague de pauvreté qui risque d’être très violente.
Concrètement, l’aide alimentaire européenne, qui représentait 3,8 milliards d’euros entre 2014 et 2020 diminuerait de moitié si les Etats-membres ne décident pas d’y consacrer une part importante du budget européen et du plan de relance dont ils vont bénéficier. Ils ont l’obligation de consacrer seulement 2 % de l’enveloppe FSE + à l’aide alimentaire et matérielle et à la lutte contre la grande précarité. Ce serait une catastrophe dans le contexte actuel de rester à de tels niveaux.
Il reste encore plusieurs leviers d’actions pour l’éviter :
· Les parlementaires européens doivent d’abord revenir sur la proposition du Conseil, à la fois en augmentant le volume financier dédié aux politiques sociales, et en ciblant spécifiquement l’aide alimentaire et matérielle.
· Les Gouvernements, et notamment le Gouvernement français, doivent mobiliser les fonds disponibles dans le budget européen et le plan de relance. L’Europe a mis sur la table une enveloppe très significative, encore faut-il que les Etats-membres se mobilisent et l’utilisent pour venir en aide aux plus démunis.
Une double condition nécessaire, mais certainement pas suffisante, alors qu’il y a déjà plusieurs mois les banques alimentaires européennes annonçaient une augmentation de 20 % des volumes de produits distribués aux plus démunis.