« On va accueillir les plus démunis parmi les plus démunis »
A l’heure où s’ouvre la 39e campagne, reportage aux Restos du Coeur de Blanquefort, en Gironde où « le nombre de famille accueillies a plus que doublé en cinq ans ».
Crédit photo : Les Restos du Coeur
« On tient », sourit Joël, co-responsable du centre de Blanquefort, en Gironde depuis 2018. A l’heure où s’ouvre la 39e campagne des Restos du Coeur, les personnes accueillies se pressent, toujours plus nombreuses à la distribution alimentaire.
Dans cette commune de Gironde comme ailleurs, la violence de l’inflation se confirme et la situation des personnes accueillies s’aggrave. En 2022/2023 (au 30 avril), les Restos du Coeur ont distribué 171 millions de repas, soit près de 30 millions supplémentaires, et accueilli 1,3 million de personnes.
A Blanquefort, Joël, Domi, Claudine et Françoise et les autres s’affairent. La bande de retraités compte parmi les 73 000 bénévoles de l’association.
« Ici, il y a une bonne ambiance. Entre nous et avec les personnes qu’on accueille. On connait les gens. Ça aide… »
Un effet ciseaux intenable
Mères célibataires, retraités, salariés aux emplois peu rémunérateurs, étudiants : cette hausse des demandes concerne tous les profils, dans tous les départements. Aux Restos, près de la moitié des personnes accueillies ont moins de 25 ans et 38% des familles n’ont plus un euro disponible une fois le loyer et les charges locatives payées.
« L’inflation n’est plus supportable pour les plus démunis et ceux qui le deviennent malgré eux. Qui aurait pu prévoir une telle hausse aussi rapide et forte du nombre de personnes accueillies dans nos centres d’activités ? », déplorait récemment Patrice Douret, Président bénévole des Restos du Coeur.
Dégradation de la situation financière des personnes, hausse rapide du recours à l’aide alimentaire, mais aussi explosion des charges qui pèsent sur les associations et notamment des coûts d’achats (les Restos achètent près du tiers de ce qu’ils distribuent) : les Restos subissent un « effet ciseaux » intenable.
« Mon inquiétude concerne aussi les bénévoles »
La hausse des prix a atteint 4% en octobre, selon les dernières données de l’Insee, celles de l’énergie (+5,2%) et de l’alimentation (+7,8%) restent fortes. Pour la première fois de leur histoire, les Restos ont été contraints de réduire le barème – soit le niveau de revenu qui donne droit à l’aide alimentaire – et la quantité de repas distribués.
Sur le terrain, Françoise Casadebaig, Présidente des Restos du Coeur en Gironde, s’est rendue dans les 42 centres Restos du Coeur du département pour accompagner au plus près le travail des bénévoles, en première ligne de ces nouvelles mesures de restriction.
« En Gironde, par exemple, le centre de Mérignac accueillait l’année dernière 500 familles et en accueille cette année, à la même période 750 familles (…) mon inquiétude est que sur le terrain, les bénévoles se sentent à l’aise avec ces nouvelles mesures qui sont très difficiles à faire accepter. »